Au lendemain de la guerre, l'État se substitue autoritairement aux syndicats
pour fixer un salaire minimum censé assurer par la loi un niveau de vie décent
aux français. Un niveau de vie ça ne se décrète pas, ça se construit par des
mécanismes de marché, mais les Hommes de l'État n'en ont cure, le "salaire
minimum", mesure hautement démagogique, leur permet de renforcer leur prestige
et leur pouvoir.
En évinçant les syndicats de leur rôle principal, les Hommes de l'État sont
obligés simultanément (en 1950) de leur accorder un nouveau rôle et un nouveau
mode de fonctionnement. C'est ainsi qu'est créé le "monopole de
représentativité des syndicats."
Au lieu de régler les problèmes salariaux localement, au plus près des salariés
et des entreprises en tenant compte des contraintes concurrentielles,
certains syndicats triés sur le volet deviennent les courroies de transmission
des revendications de la base vers un interlocuteur unique : l'État.
Le mal est fait. L'État devient l'objet de toutes les réclamations. Les plus
violents, les plus influents ou ceux qui ont la plus grande capacité de
nuisance par leur pouvoir de blocage obtiennent toujours plus d'avantages ou
toujours plus d'effectifs. Les Hommes de l'État sont incités à céder pour
acheter la "paix sociale" et obtenir leur (ré)élection.
Le SMIG puis le SMIC s'envolent, et ce dernier devient le salaire minimum le
plus élevé des grands pays industrialisés par rapport au salaire médian.
Le secteur marchand soumis à des niveaux de salaires et de charges important
essaye de gagner en compétitivité. Il emploie moins de personnel et
délaisse les secteurs nécessitant de la main d'œuvre peu qualifiée, ce qui
provoque la montée du chômage.
Parallèlement les services de l'État, et les collectivités publiques croissent
de façon vertigineuse au point qu'à ce jour, une personne sur quatre travaille
pour le secteur public.
Voyant les entreprises diminuer leurs effectifs, l'État crée des barrières au
licenciement et invente, de concert avec les partenaires sociaux, un
droit du travail pléthorique et répressif pour les entreprises.
Les entreprises freinent les embauches, sous-traitent ou font appel à
l'intérim. La productivité des salariés français (ceux qui sont encore au
travail et qui ne sont pas fonctionnaires) devient la première du monde.
Le salaire minimum élevé devient alors une barrière infranchissable pour tous
ceux dont le travail ne vaut pas un SMIC pour le marché. C'est la fameuse
trappe à la pauvreté qui frappe aujourd'hui près de 20% des personnes en âge de
travailler (10% de chômeurs et 10% d'individus qui ont définitivement renoncé à
chercher un emploi).
Les Hommes de l'État ont donc plongé dans la misère et la précarité un très
grand nombre de français qui, à cause du niveau élevé du SMIC et de
l'incroyable niveau de compétitivité forcée des entreprises françaises, ne
retrouveront jamais du travail.
Comme cela n'est pas très bon pour leur prestige les Hommes de l'Etat ont du
"réagir" et inventer de nouvelles aides destinées à préserver une autre "paix
sociale", celle des chômeurs. C'est ainsi que sont nés les RMI, API, APL, ALS,
RSA qui s'ajoutent aux multiples aides locales dans une jungle telle que les
exclus ont besoin d'aide pour remplir les dossiers d'aide.
Devant la complexité du système, les Hommes de l'État ont donc créé des
services d'aide à l'obtention des aides.
Tous ces dispositifs accroissent les charges des entreprises qui ont donc
tendance à limiter encore plus drastiquement les embauches. Le chômage
s'installe durablement.
Bien entendu les Hommes de l'État prennent soin de maquiller leur gestion
calamiteuse. Ils ne sont responsables de rien. "La mondialisation" puis "La
crise" deviennent les boucs émissaires chargés de détourner l'hostilité des
électeurs.
Effet aggravant de cette crise de l'État providence, à chaque fois que l'on
augmente le SMIC, on augmente le coût des produits de première nécessité. Mal
payer 20% de la population à ne rien faire, cela contribue à faire monter les
prix des denrées et des services de base donc à abaisser le pouvoir
d'achat des plus démunis.
Mais pas question de toucher au SMIC ni au droit du travail présentés comme des
"acquis sociaux". Les Hommes de l'État ne peuvent entamer leur prestige.
Toucher au niveau de vie décrété et règlementé reviendrait à dénigrer le
dirigisme.
Face à ce constat, la première idée géniale de Laurent Wauquiez et de la
"droite sociale" consiste, après avoir interdit le marché du travail à 20% de
la population, à l'obliger à travailler. Mais le travail que vont effectuer ces
femmes et ces hommes correspond forcément à une offre du marché. Il va donc,
soit se substituer à des postes existant soit être purement et simplement
inutile.
Deuxième idée géniale, plafonner les aides accordées par... l'État
lui-même On croit rêver. Au lieu de revoir un système qui ruine le pays
et qui plonge dans la précarité et le découragement un nombre croissant de nos
concitoyens, on rajoute une couche législative qui va encore compliquer un
système déjà ubuesque.
Après la réforme Wauquiez il y aura donc :
Un niveau de vie décrété grâce à un SMIC très élevé - 20% d'exclus interdits de travail - Des aides pour ces exclus - Des aides pour obtenir ces aides - Un plafonnement des aides pour ceux qui abusent des aides. L'obligation de travailler pour ceux qui touchent des aides parce qu'il ne peuvent pas travailler.
1 De Bob Shar -
Excellente synthèse de 60 ans d’État Providence. Et la photo est bien choisie.
2 De alcodu -
Merci Bob, et cette synthèse illustre s'il en était besoin le principe du "ce qui se voit et ce qui ne se voit pas".
Les effets pervers de l'organisation syndicale étatiste se sont fait sentir 35 ans après...
L'article est paru sur Agoravox ce matin. A vos votes et à vos commentaires !
http://www.agoravox.fr/actualites/economie/article/la-reforme-impossible-de-l-etat-93706
3 De Le Champ Libre -
Bonjour Alain,
D'accord avec toi pour dire que les solutions proposées par LW ne sont pas les bonnes.
En revanche, quand il parle "d'établir une durée minimale de travail pour que les étrangers puissent bénéficier du système social français."
Ou encore : «Ce ne sont pas les gens qui abusent, c’est notre système qui n’est pas suffisamment juste», explique-t-il. «Comment reprocher à quelqu’un de ne pas reprendre un travail s’il y perd de l’argent ou s’il gagne 2 ou 3 euros de l’heure en plus ?»
Il est dans le vrai.
4 De tetatutelle -
En tant qu'adhérente du MLG, je suis bien entendu favorable à une aide unique "totalement inconditionnelle" et à ce titre ne peut bien sûr approuver cette proposition de Wauquier. Néanmoins désolée de te faire remarquer qu'en la matière, "Alternatvie Libérale envisage apparemment de proposer pire" : le SERVICE NATIONAL ! Sur "l'ancien modèle aboli", à savoir des missions à effectuer exclusivement dans l'armée, la gendarmerie et la police ! Alors à côté de cela, la proposition de Wauquier paraît bien douce !..... Et "tu es au courant" ! Et sincèrement je ne comprends pas ton absence totale de réaction par rapport à cela !.......Sur le fait notamment qu'il sera exigé pour "tout le monde" c'est à dire "y compris pour des cas particuliers de personnes" (handicapées ou porteuses de pathologies diverses) qui sont de faits "inaptes à effectuer de telles missions" !! J'aimerais vraiment avoir ton avis là-dessus (car ça m'inquiète tu t'en doutes, et cette inquiétude-là est légitime !).
Lien de l'article en question pour rappel :
http://www.alternative-liberale.fr/...
(PS. Excuse-moi, je considère pour ma part n'être "qu'à moitié hors sujet" avec ce commentaire !).
5 De alcodu -
@ le champ libre
Je ne conteste pas le diagnostic de Wauqiez (même si le terme de cancer de la société pour désigner un dérèglement étatique est franchement nul).
6 De Le Champ Libre -
Merci de ta réponse Alain,
Je trouve moi que les termes "cancer de la société" sont parfaitement appropriés.
Quand il est plus intéressant de rester chez soi à toucher des aides que d'aller bosser, la société va forcément se casser la gueule à moyen terme.
Mais la solution n'est pas de plafonner les aides ou de faire nettoyer les chiottes aux bénéficiaires du RSA, on est d'accord.
Pour moi, la solution, c'est d'examiner la situation de chaque personne qui demande de l'aide, de lui verser ensuite une aide proportionnée à sa situation, et de bien vérifier ensuite qu'elle fait le nécessaire pour s'en sortir seule à moyen/long terme.
Les solutions étatiques/magiques style RSA, Allocation Universelle, etc... ne fonctionneront JAMAIS car elles ne seront JAMAIS adaptées à toutes les situations (et donc RSA, AU seront soit trop élevé, soit insuffisante).
Cordialement,
7 De alcodu -
@champ libre
Je comprend ton analyse et tes doutes sur l'AU. Je suis moi-même très suspicieux sur cette mesure. Il faut trouver la bonne équation et les paramètres à prendre en compte sont multiples.
En ce qui concerne le terme de cancer, je trouve qu'il jette inutilement l'opprobre sur ceux qui sont dans la trappe à pauvreté en les comparant à des cellules cancéreuses.
@ Tetatutelle
Je ne suis pas du tout favorable à un service national. Une aide ne doit pas empêcher de trouver un travail. De plus le travail forcé fausse le marché. La mesure me parait donc illogique. Ceci dit elle ne figure pas dans le programme d'AL. C'est un passage média de Louis Marie Bachelot.
8 De Le Champ Libre -
Merci de ta réponse Alain,
Content que nous soyons sur la même ligne (ou à peu près) concernant l'AU
Sinon moi ainsi que LW autant que je sache ne disons pas que les bénéficiaires du RSA sont des cellules cancéreuses.
Nous disons que quand il est plus intéressant d'être aidé que de travailler, un assistanat va nécessairement se développer, croitre et finir par étouffer la société.
Les individus n'ont "rien" à voir là dedans. Moi même, tu me donne le choix suivant :
1- tu touches le RSA tu as 1000 euros/mois
2 - tu va bosser 5J/7 40 heures par semaine, tu aura 1200 euros/mois
Il y a de très fortes chances que je prenne le choix No1 (surtout si je vois autour de moi tout le monde faire de même, les politiques se payer des cigares, des HLM de luxe, des voyages en jet, etc...)
Cordialement,
9 De tetatutelle -
@ Alain :
"Ceci dit elle ne figure pas dans le programme d'AL. C'est un passage média de Louis Marie Bachelot."
Mais Louis-Marie Bachelot a été interviewé "en tant que Président d'AL", non ? Alors ne crois-tu pas que son devoir est justement de "respecter le programme d'AL", ne "pas engager le programme d'AL dans ce qu'il n'a jamais prévu" ?!.... Dans le cas contraire, désolée on ne peut que prendre ses paroles comme "les prémisses de la modification de ce programme", penser que le programme est "en train de s'orienter en cette direction" ! (si ça n'est pas le cas, alors "qu'il le démente ouvertement" !).
@ Le Champ Libre :
Un sondage audiovisuel réalisé en Allemagne à propos de l'Allocation Universelle est là pour prouver à lui seul que "ta prophétie est fausse" : 80 % des allemands ont répondu qu'ils "continueraient à travailler" s'ils percevaient l'AU !