Les débats du soir de l'élection ont été marqués par la prise de position
forte de Dominique Strauss-Kahn pour un renouveau social démocrate du PS.
Le PS est en effet le seul grand parti de gauche qui ne se soit pas réformé en
Europe. Toujours largement influencé par la gauche marxiste, puritaine et
réactionnaire, le PS est le seul parti où les chefs d'entreprise sont
clairement désignés comme des ennemis, ou l'argent est perçu comme un mal
nécessaire, où la création d'emplois passe par l'octroi d'aides de l'Etat, où
pour empêcher le chômage on ne connait comme seul moyen que d'interdire les
licenciements et les délocalisations.
Dans ce contexte Mme Royal a donné quelques signes d'évolution, parlant de
Tony Blair au début de sa campagne, puis visitant des entreprises du nord de
l'Europe où les délocalisations sont acceptées et négociées par les syndicats,
enfin dialoguant cordialement avec François Bayrou pour finalement découvrir
que leurs conceptions économiques étaient inconciliables.
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La question se pose donc : Ségolène Royal est-elle où pas une potentielle
réformatrice social-démocrate du PS ?
J'ai bien peur que la réponse à cette question
soit tout simplement : non.
Vision archaïque de l'économie, tirades
enflammées sur le "patronat" et le "libéralisme", attitudes outrées et poing
levé pour attirer l'extrême gauche, le cocktail des vieilles recettes est
toujours là.
Il existe d'ailleurs en ce moment un critère
tout à fait déterminant pour savoir si tel ou tel dirigeant du PS est ou non un
"réformateur". Ce critère c'est la plus ou moins grande volonté affichée
d'union et de "rassemblement".
En effet tous ceux qui appelent à l'union et
au rassemblement sont clairement ceux qui ne veulent rien changer. Les Lang,
Fabius, Montebourg, ont bien compris que pour faire perdurer leurs positions au
sein du parti, il ne leur fallait pas trop s'avancer sur le terrain
idéologique. Mme Royal se retrouve donc subitement entourée de personnalités
qui se prononcent pour le rassemblement à ses côtés dans la perspective des
législatives.
Au contraire ceux qui veulent un débat
d'idées, ceux qui comme Strauss Kahn veulent provoquer la discussion pour
définir une stratégie pour l'avenir, sont les réformateurs.
Malheureusement Strauss-Kahn est bien isolé en
haut du parti. A part Jean Marie Bockel et Kouchner, tous deux situés à la
marge du PS, les appuis sont rares. Le bruit court toutefois que de nombreux
cadres du parti, moins médiatisés, seraient prêt à tenter l'aventure
social-démocrate.
Les transfuges d'IES en sont un premier
signe.
Dans tous les cas on voit mal comment cette
mutation pourrait intervenir sans la casse du parti.
Ce que beaucoup de socialistes réformateurs
n'ont pas encore bien réalisé ce sont les conséquences des deux alternatives
qui s'offrent à eux :
- Soit le PS éclate en un parti socialiste
gauchisant et un parti social-démocrate pro-européen. Dans ce cas la perte
d'effectifs du nouveau parti social-démocrate sera rapidement compensée par son
alliance avec le centre.
- Soit le PS essaie de "rassembler" c'est à
dire qu'il demeure immobile. Dans ce cas il connaîtra probablement le sort du
parti communiste : un long déclin suivi d'une extinction, avec en prime un
boulevard ouvert pour François Bayrou.