Vous croyez être anti-libéral - comme tout le monde - et si vous êtiez plus
libéral que vous ne le croyez ?
Lisez donc ce qui suit pour en décider.
Le libéralisme est un mouvement multiforme qui
recouvre plusieurs tendances.
C'est une philosophie politique. Il existe une ethique libérale, mais surtout
pas de morale libérale.
On ne peut (et il ne faut surtout pas) distinguer le libéralisme philosophique
et le libéralisme économique.
Le libéralisme est bien entendu basé sur la liberté individuelle dont découle
immédiatement la notion de responsabilité. La notion de propriété n'est qu'une
conséquence de la liberté. Il n'y a pas de liberté sans propriété et la
première propriété est la propriété de son corps. La limite à sa liberté est la
liberté des autres.
Le libéralisme est le premier mouvement qui attribue des droits à chaque être
humain. Et non des droits régissant les êtres humains entre eux. L'idée
nouvelle du libéralisme consiste à attacher des droits imprescriptibles à
chaque être humain indépendamment de sa naissance ou de sa position dans la
société.
C'est le libéralisme qui a fortement inspiré la déclaration des droits de
l'homme de 1789 inscrite dans la constitution française.
Les députés libéraux ont par deux fois, avant et après Napoléon contribués à
abolir l'esclavage en France.
Les libéraux ont toujours été extrêmement méfiants vis à vis de l'Etat sous
toutes ses formes. Ils l'accusent de ne pas avoir de contre pouvoir "naturel"
au contraire du marché qui trouve lui-même ses limites. Le marché rétribue ceux
qui rendent des services aux autres, alors que les institutions rétribuent la
naissance ou le mérite.
Aujourd'hui, la présentation du libéralisme et des libéraux est complètement
falsifiée et truquée par les étatistes. Ils ont inventé le terme néo
libéralisme qui n'a aucun sens. L'ultra libéralisme ne veut également rien
dire. Les libéraux ne sont pas plus ou moins "ultras" aujourd'hui qu'il y a
cent cinquante ans. Il n'y a aucune définition admise de ces termes autre que
celle des adversaires du libéralisme.
Le libéralisme prone la propriété absolue des êtres humains sur leur corps.
Pour un libéral il est hors de question d'empêcher quelqu'un de fumer, de
prendre des drogues ou de se prostituer, de même que la propriété de la femme
sur son corps, associée à la théorie du premier occupant lui donne le droit
incontestable de pratiquer un avortement.
Les adversaires du libéralisme sont les organisations holistes qui nient ou
réduisent le rôle et la place de l'individu : la tribu, la famille, le clan, le
gang, la cité, la nation, la patrie, les religions et les morales
imposées.
Parmi les adversaires théoriques du
libéralisme on peut citer l'historicisme, le communisme, le socialisme, le
nationalisme, les conservatismes, l'esclavage, le racisme, le colonialisme, les
despotismes en tout genre.
Les libéraux ne sont pas, par principe opposés
à l'Etat, mais l'Etat libéral est réduit à ses fonctions essentielles. C'est un
Etat minimal, fort et respectable.
Si le libéralisme est opposé au communisme en
tant que système étatique imposé il n'est pas opposé au collectivisme choisi.
Le Kibboutz, forme de communauté intentionnelle où il n'existe pas de propriété
privée, est ainsi parfaitement conforme à l'éthique libérale puisqu'on peut le
quitter.
En France qui est anti-libéral ?
pratiquement tout le monde : tous les partis extrêmes, de droite et de gauche,
l'UDF, les écologistes, 95 % de l'UMP et 98% du PS. Et encore ceux qui se
disent "libéraux" au PS et à l'UMP ne parlent que d'économie, c'est dire qu'ils
n'ont pas vraiment tout compris ! Quand à prétendre que Sarkozy est libéral
c'est une marque d'inculture politique notoire. Il suffit de lire son "discours
de Périgueux" pour voir que c'est un étatiste convaincu. Sa manie d'utiliser de
nouvelles lois pour tenter de résoudre tout les problèmes et pour tout
contrôler est totalement anti-libérale.
Un libéral ne se préoccupe jamais de savoir si une loi est bonne ou mauvaise
mais si elle est nécessaire. Un libéral ne résoudra pas les problèmes courants
en édictant de nouvelles lois. Avant de faire une loi il se demandera toujours
si on ne peut pas résoudre le problème sans en faire une. Il vérifiera que les
lois précédentes sont bien appliquées. Quand une loi est obsolète, il la
supprimera.
Pourquoi ne peut-on pas parler de morale libérale ? Parce que le libéralisme
est extrêmement tolérant. Il tolère toutes les morales auxquelles l'individu
peut librement adhérer et qu'il peut librement quitter tant qu'elles
n'empiètent pas sur la liberté des autres. Les religions font partie des
morales auxquelles ont peut librement adhérer. La notion de laïcité est donc
intimement liée à l'éthique libérale : liberté de culte quel qu'il soit et
liberté d'être athée ou agnostique.
C'est pourquoi les Etats Unis ne sont pas une nation libérale comme on l'entend
souvent. Le puritanisme américain en tant que morale imposée, l'opprobre sur
les athées, le nationalisme exacerbé sont tout à fait contraire au
libéralisme.
Les libéraux prônent une démocratie qui repose
sur la liberté et sur la tolérance. Une pratique politique dans laquelle on ne
prétend pas gouverner au nom de "Sa morale", encore moins au nom de "La
Morale", mais dans laquelle on essaye de limiter, autant que faire se peut, la
dictature de la majorité.
A bien des égards les démocraties étatiques
s'écartent de l'idéal libéral car elles utilisent les lois et les règlements
comme des instruments pour imposer à tous la morale de la majorité.
Il y a différentes sensibilités libérales allant de droite à gauche. Une chose
est sure, on est libéral avant d'être de droite ou de gauche.
1 De Thierry Jallas -
Je m'associe à la question posée par Freeman.
En outre, si je suis d'accord avec presque tout cet article, je conteste de façon catégorique le passage relatif à l'avortement. En effet, sauf erreur de part, le zygote, l'embryon, le foetus sont des être vivants, de genre humain. A ce titre, ils ont le droit au respect de leur vie ! Tout-à-fait d'accord pour reconnaître le droit aux femmes d'expulser de leur corps un intrus, mais sans tuer, auparavant ou simultanément, l'être humain qui est en elles. Tant qu'on n'a pas trouvé le moyen de faire l'un sans faire l'autre, les femmes enceintes "à leur corps défendant" doivent patienter 9 mois puis accoucher sous X. Ce point de vue est exprimé par le Professeur Bertrand Lemennicier (qui est agnostique) dans "La morale face à l'économie"
2 De alcodu -
Peut-être avez vous trouvé un début de réponse à cette question.
Le débat sur l'avortement ne peut être tranché par le raisonnement, même par celui de Bertrand Lemennicier qui est certainement l'un des plus remarquables en la matière.
Car le statut d'être humain conscient accordé à l'embryon est toujours discutable et ne peut être tranché de manière scientifique.
Le raisonnement libéral ne nous éclaire donc pas beaucoup.
Il faut donc trancher le problème par une posture : droite ou gauche.
Bien allez vous me dire, "mais dans ce cas pourquoi attribuer au "libéralisme" l'avènement du droit d'avorter si le libéralisme n'y est pour rien ? "
Eh bien justement parce que je suis libéral de gauche !
"Mais vous êtes un récupérateur du libéralisme !" allez vous me répondre.
Pas plus que Jacques de Guénin ou Patrick Simon lorsqu'ils attribuent au christianisme la source des "valeurs morales" du libéralisme, ce qui est hautement discutable sur le strict plan du raisonnement mais constitue une "posture libérale de droite".
L'éthique libérale ne permet pas de trancher sur tous les sujets de société. Il y a des interprétations possibles. On le sent bien chez Jacques de Guénin lorsqu'il invoque la responsabilité et une "morale libérale" pour dénigrer la consommation de drogues ou le libertinage.
Il y a donc place pour différentes interprétations de la pensée libérale. Droite/gauche, pourquoi pas?
Mais cette différence entre une gauche libérale et une droite libérale ne doit en aucun cas aboutir aux affrontements qui opposent la droite et la gauche étatistes, c'est à dire les socialistes et les conservateurs. Car l'une des leçons du libéralisme c'est d'essayer, autant que faire se peut, de limiter la dictature de la majorité. Laisser les morales, les croyances, les religions, les modes de vie cohabiter tant qu'ils n'empiètent pas sur les libertés des autres : voilà un objectif commun aux libéraux qui devrait largement atténuer les conflits entre leurs différentes sensibilités.
Pendant toute la sombre période du marxisme, la pensée libérale a été "portée" presque sauvée, par une tendance droitière. GL lui rend un grand hommage pour sa résistance à l'oppression et pour ses développements théoriques importants. Mais il est temps que renaisse une pensée libérale de gauche décomplexée. C'est le but de ce blog. Cela ne nous empêche pas aussi d'apprécier Jacques de Guénin et Patrick Simon...
Autre avantage - et non des moindres - de cette posture "libérale de gauche" c'est que quand vous annoncez à un socialiste ou à un alter-mondialiste que vous êtes libéral de gauche vous déclenchez immanquablement soit une réaction de rage exaspérée soit un doute existenciel profond. Dans les deux cas le doute est semé, l'équation gauche = social = socialisme est brisée.
3 De Thierry Jallas -
J'admets que l'expression "libéral de gauche" puisse provoquer la réaction et la réflexion de ceux qui se disent de gauche.
Pour les reste du raisonnement sur ce positionnement, j'avoue avoir du mal à le suivre. Avez-vous lu l'introduction de "Histoire des idées politiques aux temps modernes et contemporains", dans laquelle Philippe Nemo explique pourquoi la démocratie libérale a pour adversaires la droite et la gauche ?
Enfin, que voulez-vous dire lorsque vous écrivez que "... le statut d'être humain conscient accordé à l'embryon est toujours discutable et ne peut être tranché de manière scientifique." ?
4 De alcodu -
Oui, je sais, le libéralisme n'est ni de droite ni de gauche, il est libre...
Mais ce n'est pas avec ça qu'on va conquérir un électorat.
Comme vous, j'ai distribué des tracts sur les marchés et essayé d'accrocher avec des phrases simples (temps de parole 3 secondes). Si le débat s'engage, une question revient souvent : "êtes vous de droite ou de gauche" ?
La réponse "ni droite ni gauche, nous sommes des libéraux" est à mon avis contre-productive. Elle fait fuir. Personnellement je réponds : il y a des libéraux de droite et des libéraux de gauche mais le propre des libéraux c'est de ne pas vouloir gouverner la société au nom d'une morale de droite ou d'une morale de gauche.
Cette réponse "accroche" beaucoup plus car elle remet moins en cause l'échelle de valeurs personnelles des individus tout en les faisant douter et s'interroger sur la nature du pouvoir étatiste qui consiste à gouverner au nom d'une morale contre les autres morales.
En fait votre question me parait suffisamment importante pour que j'y consacre un ou plusieurs posts complets.
5 De baccelliguido -
Voir aussi, en sens inverse,
http://larevolutionpourquoipas.blog...
Cordialement,
BG